L’impunité policière persiste

La 20e journée internationale contre la brutalité policière était inscrite sous le thème «L’État policier : austérité de nos libertés», en référence au durcissement de la répression policière depuis le mouvement de grève sociale du printemps 2015.La tenue sans entrave de la manifestation aura pris tout le monde par surprise, incluant le Collectif opposé à la Brutalité Policière (COBP) lui-même qui s’attendait, encore une fois, à faire l’objet de profilage politique et de répression policière.

Changement de stratégie (inexpliqué) du SPVM

«Je ne suis pas sûre de prendre la rue», indiquait Liette Vidal, membre du Syndicat industriel de travailleurs et des travailleuses (SITT), lors du rassemblement familial qui précédait la manifestation du COBP au parc La Fontaine, où une certaine présence policière était déjà bien visible vers 17 h.

La militante, qui a été exposée à la brutalité policière alors qu’elle s’impliquait dans le collectif Mères en colère durant la grève étudiante de 2012, en était à sa première manifestation du 15 mars et s’inquiétait de voir le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) mettre fin à la manifestation dès le départ, comme cela avait été le cas lors de la journée internationale contre la brutalité policière de 2013, de 2014 et de 2015.
Contre toute attente, le SPVM n’a pas déployé l’antiémeute lorsque quelques centaines de personnes ont pris la rue vers 20 h

Contre toute attente, le SPVM n’a pas déployé l’antiémeute lorsque quelques centaines de personnes ont pris la rue vers 20 h et s’est contenté de gérer la circulation tout au long du trajet de quelque cinq kilomètres et demi qui a mené la marche du parc Lafontaine au square Cabot sans incident notable.

«Ils ont tellement eu de défaites en cour», analyse le professeur de sciences politiques et sympathisant du COBP Francis Dupuis-Déri, qui voit là une piste d’explication pour le changement radical d’attitude du SPVM par rapport à cette manifestation dont l’itinéraire n’avait pas été communiqué à la police et où bon nombre de protestataires étaient masqués.

Rappelons que le SPVM avait procédé à des arrestations de masse dès le départ des trois manifestations précédentes et avait même été jusqu’à déclarer la manifestation de 2014 illégale plusieurs jours à l’avance.

Or, la plupart des accusations portées en vertu du controversé règlement municipal P6 ont été abandonnées l’an dernier après le verdict rendu par le Juge Randall Richmond de la cour municipale de Montréal. L’article 500.1 du Code de la sécurité routière, utilisé par le SPVM pour mettre fin à la manifestation du 15 mars 2011, a pour sa part été jugé anticonstitutionnel par la Cour supérieure du Québec.

On peut aussi voir dans ce changement de tactique un aveu d’échec de la stratégie d’infiltration et de confrontation déployée par le SPVM lors de la manifestation du 18 décembre dernier.

Le fait que la manifestation survienne quelques jours à peine après qu’une intervention policière de routine ait mené à la mort d’un quinquagénaire à Hochelaga-Maisonneuve et une semaine après le dépôt du rapport du Coroner Luc Malouin sur la mort d’Alain Magloire n’est peut être pas étranger à la retenue dont a fait preuve le SPVM face à la manifestation du COBP.

Il n’en demeure pas moins que la décision du SPVM de «tolérer» la manifestation, officiellement en raison de son caractère paisible, tend à donner raison aux critiques, comme celles de Ligue des droits et libertés, qui dénonce le caractère arbitraire du profilage et de la répression politiques qui ciblent notamment le COBP.
Le problème persiste

Malgré le succès de la manifestation du COBP, qui aura réussi à prendre la rue pendant environ une heure sans intervention du SPVM, le problème de la violence et de l’impunité policière reste entier.
Malgré le succès de la manifestation du COBP, qui aura réussi à prendre la rue pendant environ une heure sans intervention du SPVM, le problème de la violence et de l’impunité policière reste entier.

«Les policiers sont formés à tirer pour tuer», rappelle Alexandre Popovic, militant de la Coalition contre la répression et les abus policiers (CRAP) qui déplore le «parti pris pro Taser» du coroner Malouin qui recommande d’augmenter le nombre de pistolets à impulsion électrique mis à la disposition du SPVM.

«Ça augmente le nombre d’armes potentiellement mortelles en circulation», s’inquiète Maxence Valade qui est lui-même passé à un doigt de perdre la vie lorsqu’il a été atteint en plein visage avec une balle de plastique tirée par la Sûreté du Québec lors de l’émeute de Victoriaville en mai 2012.

«Si le but c’est de sauver des vies, on n’est pas sur la bonne track», lance Alexandre Popovic qui invitant plutôt la ville de Montréal à former des escouades d’intervention de crise, composées uniquement de civils, pour éviter les fusillades policières comme celles qui ont coûté la vie à Mario Hamel et Patrick Limoges, Farshad Mohammadi, Jean-François Nadreau, Alain Magloire et tant d’autres.

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