Prison de Bordeaux Un détenu meurt après une intervention, un agent suspendu

Le décès de Nicous D’Andre Spring, 21 ans, a été constaté en centre hospitalier dimanche, indique le ministère de la Sécurité publique (MSP).

« La personne incarcérée y avait été conduite par ambulance le 24 décembre après avoir perdu conscience à la suite d’une intervention physique » à l’Établissement de détention de Montréal (EDM), aussi appelé prison de Bordeaux, précise la porte-parole du MSP Marie-Josée Montminy.

« En vertu de l’analyse préliminaire des évènements par le sous-ministériat des services correctionnels du MSP, un agent des services correctionnels de l’EDM a été relevé provisoirement de ses fonctions », ajoute-t-elle. L’identité de l’agent n’a pas été divulguée.

Le MSP doit mener une enquête administrative sur les évènements, qui s’ajoute à l’enquête de l’équipe des crimes contre la personne de la Sûreté du Québec (SQ) que le corps policier a annoncée mardi.

« Il appartient aux policiers de déterminer si des accusations doivent être déposées à l’issue d’une enquête criminelle et au coroner de déterminer la cause du décès », indique Mme Montminy, du MSP. L’agent Nicolas Scholtus, de la SQ, a auparavant dit qu’une autopsie serait pratiquée pour déterminer la cause du décès.

Selon Mathieu Lavoie, président du Syndicat des agents de la paix en services correctionnels du Québec (SAPSCQ-CSN), des agents correctionnels ont utilisé du « poivre de Cayenne » et un masque anticrachat pour maîtriser Nicous D’Andre Spring après une altercation avec d’autres détenus. M. Lavoie précise que l’utilisation du gaz poivré a été ordonnée par un gestionnaire, qu’il n’a pas identifié.

Le président du syndicat affirme que les agents « ont dû utiliser le poivre de Cayenne pour contrôler la personne qui essayait de mordre et de cracher sur les agents » et que « suite à l’intervention avec le poivre de Cayenne, la personne aurait eu un malaise ».

M. Lavoie n’est pas en mesure de dire si le détenu portait le masque au moment où il a été poivré. Il n’est pas non plus en mesure de dire si le port du masque pouvait induire un risque supplémentaire lorsque du gaz poivré est utilisé.

« Il y a toujours un risque lors de l’utilisation du poivre de Cayenne […] qu’une personne porte ou non un masque anticrachat », dit M. Lavoie. Selon lui, les évènements du week-end soulèvent « des questions sur les différentes armes intermédiaires, puisque la seule arme intermédiaire qu’on a, c’est le poivre de Cayenne », dit-il, ajoutant qu’une telle arme peut causer une détresse respiratoire.

Un guide toxicologique de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) note que l’utilisation du gaz poivré peut « augmenter le risque d’arrêt respiratoire ». Des dizaines de cas de décès en détention impliquant le gaz poivré ont été rapportés aux États-Unis, mais des facteurs comme la position de la victime lors de l’arrestation, l’intoxication ou des maladies préexistantes « ont causé ou ont contribué à la plupart des cas de décès », précise l’INSPQ.

Nicous D’Andre Spring était détenu en attendant son procès pour des chefs d’accusation de voies de fait, de voies de fait contre un agent de la paix, de port d’arme dans un dessein dangereux et d’omission de se conformer à une ordonnance.

Interpellé par La Presse, le cabinet du ministre de la Sécurité publique, François Bonnardel, offre ses « sincères condoléances à la famille et aux proches de la victime ». « Le ministre Bonnardel est très préoccupé par la situation et a demandé à ce que toute la lumière soit faite sur l’évènement », indique la porte-parole Roxanne Bourque.

« La SQ mène l’enquête. Nous allons suivre toutes les recommandations qui découleront de cette enquête », conclut Mme Bourque.

La Presse a tenté à de multiples reprises de joindre l’avocate de Nicous D’Andre Spring mardi et mercredi, sans succès.

Sur les réseaux sociaux, des proches ont publié une invitation à une veillée aux chandelles à la mémoire de Nicous D’Andre Spring vendredi soir au parc Benny, dans le quartier Notre-Dame-de-Grâce. Une campagne de sociofinancement a été lancée en ligne afin d’aider sa famille à payer les funérailles et « atténuer le stress financier auquel [ils sont] actuellement confrontés ».

Des proches ont publié une invitation à une veillée aux chandelles à la mémoire de Nicous D’Andre Spring vendredi soir au parc Benny, dans le quartier Notre-Dame-de-Grâce.

« C’était un grand gars, presque 6 pi 5 po, mais extrêmement gentil », dit Sadrac Christophe Anglehart-Reven, qui se décrit comme un ami de longue date du défunt. Il ajoute que Spring n’était pas du genre à provoquer des conflits, malgré son physique imposant, et qu’il était toujours très poli.

Patrick Mckoy dit l’avoir rencontré en 2017 avec d’autres amis. Il décrit Nicous D’Andre Spring comme un gars chaleureux et drôle. « Il était comme un petit frère pour moi », dit-il, ajoutant avoir eu le « cœur brisé » par la nouvelle de sa mort.

« Nous devons garder la tête haute et obtenir justice pour lui et sa famille », conclut M. Mckoy.

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