Les dépenses du SCRS explosent

«Ce qui me garde éveillé la nuit, ce sont ceux qui ne sont pas encore sur notre radar». Les événements de Saint-Jean-sur-Richelieu venaient tout juste de se produire, lundi, quand le directeur adjoint des opérations au Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), Jeff Yaworski, a prononcé ces mots aux sénateurs réunis en comité parlementaire à Ottawa.

Or, ce n’est pas le cas de Martin Rouleau, l’homme qui a foncé sur les militaires, tuant l’un des deux. Il était connu des autorités. Son passeport avait été saisi. Un agent de la GRC se rendait à la mosquée quelques fois par mois pour le garder à l’œil…Politique

Il était donc sur l’écran radar, mais son geste n’a pu être prévenu. L’enquête en cours nous en apprendra certainement davantage.

Si l’on se fie aux chiffres, l’écran radar du SCRS est certainement plus gros, et plus sensible, qu’il y a quelques années.

Le budget du SCRS explose littéralement. Il était de 179 millions de dollars en 2000. Il est passé à 540 millions en 2012*. Une hausse de 202 % en 12 ans.

La croissance des effectifs a pris la même courbe ascendante.

En 2000, 2 016 personnes travaillaient au SCRS. En 2013, elles étaient 3 200 — un bond de 59 %.

Pour accueillir tout ce personnel, l’organisme a aménagé dans un nouveau siège social, à Ottawa, en octobre 2011, construit au coût de 70 millions de dollars.

Dans les années 1980, le SCRS dépensait 80 % de son budget sur des opérations de contre-espionnage, l’une de ses missions. C’était la Guerre froide. Une autre époque. Maintenant, cette même proportion va à la lutte au terrorisme et au financement du terrorisme. Le 11 septembre 2011 a tout changé.

Le SCRS compterait moins de 200 employés à l’étranger. Son travail est surtout concentré sur les menaces au Canada. Il a toutefois signé des ententes de partage de renseignement avec 280 organismes ou agences de sécurité dans 151 pays — 60 ententes sont toutefois considérées inactives, puisque aucun échange de renseignements n’a eu lieu depuis au moins un an.

Certaines opérations militaires du Canada à l’étranger utilisent les services de l’organisme. Le SCRS était notamment présent aux côtés des soldats en Afghanistan.

Le grand patron du Service canadien de renseignement de sécurité, le québécois Michel Coulombe, avait sonné l’alarme, tout en se voulant rassurant — un équilibre délicat —, pas plus tard que le 8 octobre dernier, encore lors d’une comparution en comité parlementaire.

M. Coulombe affirmé que le groupe armé État islamique, et la radicalisation qu’il entraîne, «pose une menace réelle, mais comme je l’ai dit, nous n’avons aucune information indiquant une attaque imminente», a alors déclaré M. Coulombe.

Même si 90 enquêtes sont en cours sur autant d’individus associés au terrorisme au Canada, «nous disons aux gens qu’ils doivent continuer à vaquer à leurs occupations quotidiennes, mais ils doivent être vigilants», a soutenu Michel Coulombe.

* Il est difficile d’évaluer le budget du SCRS après 2012. Le dernier rapport annuel du SCRS, dévoilé en janvier 2014, ne mentionne que le budget de 2011-12. Le document affirme toutefois que le budget de l’organisme a été amputé de 15 millions de dollars en 2012-2013. Dans le cadre du Plan d’action pour la réduction du déficit du gouvernement, annoncé en 2012, le budget du SCRS a été amputé d’un autre 13,7 millions de dollars en 2012-2013. De plus, le budget du SCRS serait amputé de 24,5 millions de dollars à partir de 2014-2015, mentionne l’organisme. Mais il peut aussi avoir accès à des fonds spéciaux, de sorte qu’il est difficile de connaître le budget exact du SCRS en 2013 et 2014.

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