Les parents des disparus sillonnent le Mexique

«Cherchez-les, ils sont vivants!», exigeaient toujours jeudi les proches des 43 étudiants disparus dans le sud du Mexique, en entamant une tournée nationale pour sensibiliser la population et faire pression sur les autorités, contestant la mort des jeunes gens.

«Nous sommes sûrs qu’ils sont vivants et nous allons continuer à les chercher. Nous irons jusqu’au bout», a déclaré à l’AFP Felipe de la Cruz, porte-parole des parents, avant de monter à bord de l’un des trois bus dans lequel des proches et anciens camarades des disparus comptent se rendre jusque dans l’Etat de Chihuahua (nord), frontalier avec les États-Unis.

Au total, trois caravanes doivent quitter l’école normale rurale d’Ayotzinapa, où étudiaient les disparus dans l’État du Guerrero (sud), à environ 300 kilomètres de la capitale, pour sillonner le pays et sensibiliser la population à leur cause.

Peu avant le départ, un demi-millier de personnes vêtues de blanc sont venues soutenir les manifestants, qui ont prévu de rallier Mexico le 20 novembre afin de faire pression sur les autorités, accusées de n’avoir pas tout fait pour retrouver les disparus.

«Je lutte parce que je ne veux pas être le 44e», pouvait-on lire sur une pancarte. «Dehors Peña Nieto» ou «Et si c’était tes enfants ?», clamaient d’autres.

La disparition de ces 43 étudiants, le 26 septembre, après une attaque conjointe de policiers municipaux et de narcotrafiquants dans la ville d’Iguala (sud), a provoqué la plus grave crise pour Enrique Peña Nieto depuis son accession à la présidence du Mexique en décembre 2012.

Mais, en dépit de l’émotion et de l’indignation créée par cette affaire au Mexique et dans le monde, le chef de l’État a maintenu sa tournée internationale cette semaine en Chine et en Australie à l’occasion des sommets de l’Apec et du G20.

«Il n’a accordé aucune importance à notre souffrance», a critiqué auprès de l’AFP Epifanio Alvarez, père d’un disparu.

En colère, les familles refusent de se ranger derrière l’explication officielle donnée vendredi dernier par le ministre de la Justice, Jesus Murillo Karam, faisant état de la mort des jeunes gens. «Ils sont disparus mais pas morts. Nous voulons qu’ils nous aident à les trouver. Je ne crois pas le gouvernement», a martelé Blanca Navas, mère d’un des étudiants.

Selon M. Karam, trois membres des Guerreros Unidos, un cartel lié à l’ancien maire d’Iguala et à son épouse, ont avoué avoir tué les jeunes puis fait brûler les corps sur un gigantesque bûcher dans une décharge avant de disperser les restes dans une rivière.

Le ministre a estimé qu’il serait très difficile d’identifier des restes carbonisés qui ont été retrouvés, précisant qu’il n’est possible de réaliser des tests ADN que sur deux fragments d’os envoyés pour analyse à un laboratoire spécialisé de l’université d’Innsbruck, en Autriche.

Le travail d’identification pourrait prendre «plusieurs semaines», avait précisé mercredi à l’AFP le vice-ministre des Affaires étrangères, Juan Manuel Gomez Robledo. L’annonce de la mort des étudiants avait provoqué une recrudescence des mobilisations parfois violentes organisées notamment par des enseignants membres d’un syndicat radical d’extrême-gauche.

Depuis cette date, plusieurs bâtiments publics et un local du parti présidentiel ont été mis à sac et partiellement incendiés dans le Guerrero, l’un des Etats les plus pauvres et violent du pays.

Jeudi, l’ambassade des Etats-Unis a recommandé à ses ressortissants d’éviter le Guerrero «en raison du risque permanent de violences».

L’affaire, qui jette une lumière crue sur la collusion des autorités politiques et policières avec le crime organisé, a déjà eu quelques conséquences politiques, avec la démission du gouverneur de l’Etat de Guerrero puis celle, mercredi, du procureur général de l’Etat.

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