Dénonçons la répression politique et répliquons !

Le 6 janvier 2012, Farshad Mohammadi a rejoint la longue liste de personnes tuées par la police de Montréal. Ce triste événement rappelle celui qui est survenu en juin 2011 alors que Mario Hamel et Patrick Limoges ont eux aussi succombé aux tirs des policiers du SPVM. Mis à part les policiers et policières, ministres et autres représentant-e-s de l'autorité, rares sont les personnes qui doutent aujourd'hui de l’existence de la brutalité policière. La mort de ces personnes confirme une fois de plus la présence de pratiques de profilage bien ancrées chez les policiers.

Grâce aux luttes des familles et autres enquêtes publiques, nombreux sont les cas de brutalité policière qui ont été rendus publics. Plusieurs ont été choqués de constater que, dans la majorité des cas, les interventions policières étaient teintées de discrimination raciale et sociale, mais on ignore souvent qu'il existe une autre forme de profilage : le profilage politique.

Les médias québécois ont propagé un portrait critique de la répression dont étaient victimes les mouvements de révolte en Europe, en Afrique et en Asie. Or, ces mêmes médias oublient trop souvent qu'ici aussi la répression politique est une réalité qui sévit tous les jours. Depuis 1997, environ 4000 arrestations à caractère politique ont été effectuées par la police de Montréal, et dans la grande majorité des cas, les prévenu-e-s ont été acquitté-e-s. En 2005, le Comité des droits de l’Homme (et de la femme ?) de l’Organisation des Nations Unies a par ailleurs déclaré s’inquiéter que la police, en particulier à Montréal, pratiquait des arrestations de masse de manifestant-e-s. Le comité avait alors exigé la tenue d’une enquête publique sur les arrestations à caractère politique survenues au Québec entre 1999 et 2005. Sept ans plus tard, nous constatons que les autorités municipales, provinciales autant que fédérales ont fait la sourde oreille à ce rapport de l’ONU comme aux rapports de plusieurs autres organisations.

Y a-t-il un lien entre ce manque de volonté et la tangente politique qui marque les pays occidentaux depuis plus d'un siècle ? Chose certaine, ceci n’est certainement pas étranger au fait que la répression des mouvements politiques est encouragée et supportée par un système organisé, amalgamant l’élite économique et politique canadienne. Déjà en 1950, le gouvernement du Canada avait instauré un programme secret connu aujourd'hui sous le nom de PROFUNC. Ce programme avait pour but la création de prisons secrètes dans lesquelles seraient incarcérées les personnes surveillées par la Gendarmerie Royale Canadienne en raison de leur participation à des mouvements politiques. C'est ce programme qui a conduit à l'arrestation de centaines de militant-e-s souverainistes, pacifistes et communistes lors de la crise d'octobre en 1970. Le public a perdu trace de ce programme en 1983 avec la création du Service Canadien de Renseignement et de Sécurité (SCRS) et rien ne prouve que cette agence fédérale y a mis fin.

Pouvons-nous espérer que la situation a changé ? Tout porte à croire que non. Depuis 2001, la GRC, le SCRS, la Sûreté du Québec (SQ), les services municipaux de police et les services de sécurité privée investissent toujours plus de temps et d'argent pour mater toute forme de contestation politique. À Montréal, le SPVM verra son budget augmenté de 28 millions pour 2012 au moment même où celui-ci a mis sur pied une escouade spéciale de «légitimation de la discrimination». En effet, visant les mouvements contestataires montréalais, le «Guet des activités et des mouvements marginaux et anarchistes» (GAMMA) du SPVM n'a aucun autre but que de faire taire des individus dont les opinions politiques ne sont pas celles de l'élite économique et politique. Ayant conduit au cours des derniers mois à plus de 12 arrestations à caractère politique, nous ne pouvons que nous inquiéter de la tournure que prennent les événements. Le message du SPVM est clair : taisez-vous, restez dans les rangs, ou vous visiterez nos geôles.

Dans ce contexte, la réalité des individu-e-s participant à des mouvements politiques est plus qu'alarmante. Ceux et celles qui participent à des mouvements qui critiquent de façon radicale la redistribution de la richesse se font infiltrer, saboter et violemment réprimer. Ceux et celles qui revendiquent davantage de droits pour les femmes, les immigrant-e-s, les démuni-e-s, les locataires ou les chômeurs et chômeuses sont fréquemment victimes d'intimidation et de harcèlement de la part des policiers et policières. Dans le cas d'une grève étudiante cet hiver, il ne sera pas surprenant de voir l'histoire récente se répéter : les arrestations arbitraires de membres du mouvement étudiant et la répression violente dont ils et elles ont été victimes au printemps et à l'automne dernier sont encore trop fraîches dans nos mémoires. Bref, le profilage politique est une réalité bien présente et agissante.

Pour cette raison, mais aussi parce que nous croyons que seule l'action politique nous permettra d'en finir avec les injustices et les inégalités, nous dénonçons vivement toute forme de profilage, notamment politique, de la part des services de police. Nous supportons et supporterons toujours toute forme d’action individuelle ou collective qui aura pour but de mettre fin aux pratiques policières dignes d'un état autoritaire et asocial.

La Convergence contre la Répression Politique et Policière