La mort de George Floyd relance en France le débat sur les violences policières

La mort de George Floyd résonne particulièrement en France où le décès de cet Américain noir donne un nouvel écho à ceux qui dénoncent les violences policières ciblant les minorités et accusent les autorités de ce pays de « déni ».

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Malgré une interdiction des autorités régionales en raison de la crise sanitaire, au moins 20 000 personnes ont répondu mardi à Paris à l'appel du comité de soutien à la famille d'Adama Traoré, jeune homme noir de 24 ans mort en région parisienne en 2016 après son interpellation. Un « succès » populaire inédit pour les militants et associations engagés dans la lutte contre les violences policières en France.

Mais ceux-ci espèrent « plus » et veulent imposer durablement « les violences policières » dans le débat public alors que l'exécutif français réfute l'utilisation même du vocable.

En France, « on vit dans le déni. Toutes celles et ceux qui dénoncent les violences policières racistes sont jetés en pâture dans les médias. Les politiques et des ministres montent au créneau pour protéger la corporation », estime Amal Bentounsi, membre du collectif « Urgence notre police assassine ».

« Les Français n'osent pas se positionner sur le sujet de peur de se faire taxer d'anti-flic, d'antirépublicain, sauf qu'en France, on a des George Floyd », assure la militante, citant le cas de Cédric Chouviat, un livreur de 42 ans décédé à l'issue d'un contrôle routier début janvier à Paris.

Le président de SOS Racisme Dominique Sopo dénonce pour sa part « le racisme qui traverse les forces de l'ordre comme aux États-Unis ». « On est dans une doctrine de l'interpellation et non de la protection de la population et on finit par avoir des policiers qui peuvent traiter un Égyptien de +bicot+ » (terme péjoratif et raciste désignant un Arabe nord-africain, proféré lors d'une interpellation en région parisienne en avril, NDLR).

AFP

« Brebis galeuses »

Violences, discriminations: à l'appui de leurs propos, militants et associatifs rappellent qu'en novembre 2016, dans une décision inédite, la Cour de cassation a condamné l'État français sur la base de recours de treize personnes d'origine africaine qui dénonçaient des contrôles policiers injustifiés, parfois associés à des palpations et insultes, dans le quartier d'affaires parisien de la Défense.

« Il faut sanctionner les brebis galeuses », plaide Youcef Brakni, du comité La Vérité pour Adama, avec dans son viseur une réforme de la police des polices en France, une revendication portée par quelques personnalités politiques.

Face à ces accusations, le préfet de police de Paris et le directeur général de la police (DGPN) sont montés au créneau. « Non, la police en France n'est pas raciste », a déclaré le DGPN Frédéric Veaux.

Sur quelque 1500 enquêtes judiciaires confiées à la police des polices en 2019, seule une trentaine concernerait des faits de racisme ou de discrimination qui appellent le cas échéant, « les sanctions les plus sévères », a-t-il ajouté, mettant en garde contre les tentatives de « récupération » et les « analogies » avec les États-Unis.

Pour le chercheur Mathieu Zagrodzki, « il y a des différences entre ces deux pays » notamment « dans le rapport à la violence, la circulation des armes à feu, et le mandat que l'on donne à la police », explique-t-il dans l'hebdomadaire Marianne.

« En France, la police blesse beaucoup, mais elle tue peu. Les polices américaines tuent plus d'un millier de personnes par an, pour 320 millions d'habitants. La police et la gendarmerie en France, une vingtaine », avance M. Zagrodzki, auteur d'un ouvrage sur ces deux polices.

Ancien policier et président de l'association Agora des citoyens, de la police et de la justice, Christophe Korell appelle à renouer le dialogue, notamment dans certaines banlieues françaises.

« On a perdu la proximité avec ces citoyens car on s'est coupé de 90% de la population qui y vit à cause des 10% qui forment un noyau délinquant », estime M. Korell, ex-officier de police judiciaire.

S'il ne nie pas que la police soit confrontée à des problèmes de racisme, c'est le cas de « toute la société française ». Ni plus ni moins, selon lui.

« On a des policiers qui ont toute l'année le nez dans la misère sociale. Les policiers ont parfois du mal à s'extraire, à prendre du recul. De là naît le danger de la généralisation ».

Sa solution? « De la formation, à l'école et tout au long de la carrière, et du suivi psychologique ».
France: le gouvernement promet «une sanction» pour «chaque faute» ou mot raciste dans la police

Le ministre français de l'Intérieur Christophe Castaner a promis mercredi que « chaque faute, chaque excès, chaque mot, y compris des expressions racistes » feraient l'objet d'une « sanction », au lendemain de manifestations à Paris pour dénoncer « les violences policières », dans le sillage des manifestations contre le racisme aux États-Unis.

« Je suis, sur ce sujet, intransigeant », a déclaré au Sénat M. Castaner, alors que la mort aux États-Unis de George Floyd, Américain noir asphyxié par un policier, a donné un nouvel écho en France à la dénonciation des violences policières ciblant les minorités.

« L'exigence que nous avons vis-à-vis des policiers qui fauteraient, c'est garantir la sérénité du travail de l'ensemble de la police et de la gendarmerie, garantir la défense de cette police républicaine qui, au quotidien, combat le racisme, combat l'antisémitisme et s'engage pour défendre l'honneur de la République », a déclaré M. Castaner.

« S'il y a faute, elle doit être sanctionnée, et elles sont sanctionnées », a ajouté le ministre.

Quelque 20 000 personnes ont manifesté mardi soir à Paris à l'appel du comité de soutien à la famille d'Adama Traoré, un jeune homme noir de 24 ans mort en 2016 après son interpellation.

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