« Détenus, on a violé vos droits, réclamez ! »

Dans le petit bureau de son appartement de Sherbrooke où Mario Pelchat s’installe habituellement pour dessiner, la lumière est faible en cet après-midi d’automne. Assis dans le contre-jour, l’homme de 57 ans nous confie qu’il a hésité avant d'accepter de nous parler. « Beaucoup de gens vont dire : ben, il a commis un crime; il a eu ce qu’il mérite. »

Mario Pelchat a commis un vol qualifié pour se payer de la drogue. La cocaïne était sa maîtresse de prédilection. "J’ai eu très honte de ce que j’avais fait. Je méritais d’aller en prison. Mais je ne me doutais pas de ce que j’allais y subir", dit-il, encore ébranlé par des souvenirs qui lui font faire des cauchemars.

Des tribunaux ont condamné le gouvernement fédéral à verser plus de 28 millions de dollars en compensation à des détenus mis en cellule d'isolement plus de 15 jours consécutifs. Mais le temps presse. À peine 40 % des gens visés ont réclamé leur dû, les autres ont jusqu’au 7 novembre pour le faire.

L’homme est incapable à ce jour de demeurer dans un espace clos, une pièce fermée. Il panique, cela le renvoie dans sa tête au cauchemar du "trou".

Cela se passe le 3 avril 2017. Pelchat raconte que, ce jour-là, il se tient debout dans sa cellule, dos à la porte. Un gardien lui touche l’épaule, ce qui le surprend. "J’ai fait le saut. J’étais nerveux. Par réflexe, je l’ai poussé et il est tombé."

À partir de ce moment, le récit de Pelchat devient émotif. "Les gardiens sont entrés à quatre dans ma cellule. Ils m’ont traîné dehors dans la neige, pieds nus. Ils m’ont déshabillé et m’ont mis au trou."
L'homme est submergé par l'émotion en évoquant ce qu'il a vécu.

Mario Pelchat a souffert de l'isolement en prison.

Le trou. C’est le nom qu’on donne dans le milieu carcéral à cette pratique qui consiste à isoler un détenu 23 heures sur 24 dans une cellule vide. Selon les Nations unies, garder un prisonnier plus de 15 jours en isolement équivaut, ni plus ni moins, à de la torture. De nombreuses recherches ont démontré à quel point la privation de contacts humains est dommageable pour la santé cognitive et mentale des détenus.

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