Commission Ménard - Manifester peut inclure le blocage de ponts, dit Amnistie

«Exiger dans un règlement de ne pas bloquer un pont ce serait une entrave à la liberté de manifester pacifiquement», a indiqué lundi matin Béatrice Vaugrante, présidente d’Amnistie internationale section Canada francophone, devant la commission Ménard sur les événements du printemps 2012.

Une manifestation, malheureusement oui, ça dérange, a rappelé Mme Vaugrante. Si elle encourage le dialogue entre les manifestants et les forces policières pour éviter de trop perturber, elle ne croit toutefois pas qu'il faille aller jusqu'à interdire le blocage de pont ou tout autre événement «inacceptable et qui dérange» par une loi.

En plus d'exiger une commission d'enquête publique et indépendante, l'organisation de défense des droits humains en a profité pour dénoncer les trop grandes restrictions du droit de manifester par les règlements ou la police. «500.1 ou le règlement P6 de la Ville de Montréal qui permettent ce genre d'arrestations massives […] c'est une entrave, une restriction trop grave. On peut et on doit arrêter les personnes sur qui pèsent des soupçons raisonnables. Mais pas 500 personnes», a dit Mme Vaugrante.

Selon elle, la tactique de la souricière met en danger «la volonté d'un individu à vouloir manifester». Par crainte d'être arrêté au sein d'un groupe, de ne pas savoir si la manifestation est légale ou pas ou si elle est tolérée, par crainte des amendes trop salées ou des conditions de détention dans le cas d'une arrestation, bien des gens se retiendront de descendre dans les rues. «C'est un pouvoir très large donné à la police qui réfrène la volonté des gens de pouvoir s'exprimer pacifiquement», a soutenu Mme Vaugrante.

Déontologie insuffisante

Déposer des plaintes en déontologie policière n'est pas suffisant pour que les manifestants puissent obtenir justice. D'abord parce que dans le cas des événements du printemps 2012, il convenait d'avoir une «approche systémique». «On n'est pas dans du cas par cas d'un policier ayant commis des actes répréhensibles. On est dans le cas de pratiques policières. Quel ordre a été donné, quel règlement a permis au policier d'agir de cette façon-là?»

Lors de son discours d'ouverture de cette deuxième semaine d'audiences, le président de la commission, Serge Ménard, a reconnu du bout des lèvres qu'il serait impossible de remplir la mission confiée par le gouvernement Marois. Il a rappelé qu'il devait, en l'espace de quelques semaines, produire un rapport sur des heurts s'étant échelonnés sur une période de plusieurs mois dans plusieurs villes du Québec. Cela est bien peu comparativement aux 21 mois qu'aura duré la commission Morden, dont le mandat était de faire la lumière sur les trois journées d'émeute survenues dans les rues de Toronto lors du Sommet du G20 en juin 2010, a suggéré M. Ménard.

Les trois commissaires ont semblé apprécier le témoignage des trois représentantes d'Amnistie internationale et entendent en tirer des leçons. La commissaire Claudette Carbonneau a salué le courage de l'organisation, indiquant que «soutenir que des choses doivent être tolérées même si elles dérangent, ça prend tout un courage».

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