Arrestations de masse illégales: Valérie Plante présente ses excuses sur Twitter

La mairesse de Montréal Valérie Plante s’est excusée sur Twitter mardi matin pour les torts subis par les personnes arrêtées en masse par le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) dans la dernière décennie. Le matin même, des représentants des actions collectives remportées en février contre la Ville en avaient fait la demande expresse en conférence de presse.

« Le droit de manifester est fondamental et nous le défendrons toujours, a assuré la mairesse de Montréal, Valérie Plante, mardi midi sur Twitter. C’est pourquoi je réitère les excuses de la Ville de Montréal envers les personnes qui ont manifesté en 2012 et dont les droits ont été brimés par l’ancien règlement P6, abrogé par notre [administration]. »

Des excuses publiques plus « sincères » avaient été demandées le matin même par des représentants des actions collectives contre la Ville de Montréal lors d’une conférence de presse tenue à l’Université du Québec à Montréal.

« Nous ne voulons pas d’excuses au rabais », avait alors lancé Sandrine Ricci, représentante de l’une des 16 actions collectives qui a eu gain de cause face à la Ville de Montréal par une entente à l’amiable le 22 février.

La représentante de l’une des actions collectives, Sandrine Ricci

Elle demandait des excuses publiques collectives plus visibles que celles jointes sur le site de la Ville de Montréal dans un communiqué⁠1 d’un paragraphe difficile à trouver.

L’administration municipale a réitéré à La Presse sa reconnaissance du droit de manifester. « [Ce droit] est fondamental et notre administration a toujours été engagée à défendre la liberté et la sécurité des citoyennes et des citoyens qui expriment leur point de vue », a-t-on indiqué au cabinet de la mairesse.

Le règlement P6, qui obligeait notamment les manifestants à fournir leur itinéraire et les empêchait de se couvrir le visage (adopté par l’administration de Gérald Tremblay), a d’ailleurs été abrogé par l’administration Plante, rappelle-t-on au cabinet.
« J’ai craint pour ma sécurité »

Isabel Matton

« Ce soir-là, c’est entre autres mon droit à la sûreté et mon droit à l’intégrité qui ont été bafoués, mais aussi notre droit à la liberté d’expression et de réunion pacifique, et d’association, qui ont été brimés », a témoigné mardi Isabel Matton. Le 20 mai 2012, celle qui était alors éducatrice en garderie a participé à une manifestation nocturne à l’angle des rues Sherbrooke et Saint-Denis, à Montréal.

La manifestation se déroulait dans le cadre du printemps érable en opposition à la hausse des droits de scolarité, mais aussi à la loi nouvelle spéciale 78 du gouvernement Charest, adoptée deux jours plus tôt. Cette loi controversée limitait entre autres le droit de manifester.

Devant les médias, Mme Matton a affirmé qu’elle vit toujours des séquelles de l’arrestation illégale subie ce soir-là : « J’ai craint pour ma sécurité. J’ai été aveuglée par le poivre de Cayenne, j’ai respiré des gaz lacrymogènes pour la première fois, j’ai entendu une bombe assourdissante exploser juste à côté de moi. J’avais peur. […] J’ai reçu des coups de bouclier alors que je criais, en larmes, aux policiers d’arrêter de me faire mal », décrit-elle.

« On a été détenus pendant des heures, pendant la nuit, sans accès à l’eau, à des toilettes, à de la nourriture, pendant que les policiers nous narguaient, en menaçaient certains de nous donner une contravention s’ils urinaient sur la voie publique, poursuit-elle. On s’est fait dire qu’on méritait comment on était traités. »

Aujourd’hui, elle fait encore des cauchemars. « J’ai eu peur de sortir manifester. J’ai encore peur de manifester », confie-t-elle.
Une demande de reconnaissance

Les six représentants de différentes actions collectives ont décidé de prendre la parole mardi, car ils estiment que la Ville de Montréal doit aussi faire état des changements apportés par son administration pour s’assurer que le SPVM modifie ses pratiques.

Rappelons qu’en vertu de l’entente signée en février, près de 3200 personnes se partageront 6 millions de dollars, soit une indemnisation d’environ 1500 $ par personne.

Au-delà de la somme d’argent, c’est la portée symbolique de cette victoire juridique qui importe, expliquent plusieurs représentants rassemblés à l’UQAM.

« L’objectif du recours collectif n’était pas de réduire nos droits fondamentaux à une somme d’argent, mais d’amener la Ville à assumer pleinement les conséquences de sa gestion antidémocratique des manifestations. Les excuses n’ont de sens que si elles sont clairement, explicitement et publiquement exprimées et assumées », ont-ils indiqué dans un communiqué de presse.

Les représentants ont fait référence aux excuses publiques en 2017 de l’ex-maire de Montréal Denis Coderre concernant les rafles policières auprès des communautés LGBTQ+, de 1960 à 1990.

Le SPVM a réagi de son côté en soulignant « l’évolution constante » de ses pratiques afin « d’augmenter son expertise ». « Et ce, toujours dans le même but : maintenir le juste équilibre entre le respect des droits et des libertés individuels de notre société démocratique et le respect de la paix et de la sécurité publique dans les espaces urbains collectifs au profit de la jouissance paisible des lieux par l’ensemble de la population. »
1 Consultez le communiqué succinct de la Ville de Montréal : https://portail-m4s.s3.montreal.ca/pdf/declaration_de_la_ville_de_montre...

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